« Rendez ma joie parfaite,
Ayant un même sentiment, un même amour, une même âme, une même pensée. »
Philippiens deux : le verset deux.
La Communion véritable.
L'Unité parfaite.
L'Harmonie
essentielle.
La Symphonie glorieuse.
Frères et sœurs bien-aimés,
Imaginez une église autrefois
florissante de huit cents membres qui s'effondre en l'espace de deux années.
Pas à cause de la persécution, pas à cause de l'hérésie, pas à cause de
l'immoralité, mais à cause de quelque chose de bien plus insidieux : la division.
Tout aurait commencé par un désaccord apparemment insignifiant sur la couleur
des nouveaux bancs. Puis est venu un conflit sur le style de musique. Ensuite,
une querelle sur le budget missionnaire. Puis des accusations murmurées, des
clans formés, des réunions secrètes organisées. Le pasteur, un homme de
soixante-cinq ans qui avait servi fidèlement pendant trente années, s'est
retrouvé pris entre deux factions irréconciliables. Un dimanche matin terrible,
alors qu'il montait en chaire pour prêcher, il s'est effondré, terrassé par une
crise cardiaque. Ses derniers mots, murmurés dans l'ambulance, furent
déchirants : « Ils ont tué l'unité... et l'unité m'a tué. »
Cette tragédie hypothétique résonne
aujourd'hui comme un avertissement prophétique pour toutes nos assemblées.
L'apôtre Paul, écrivant aux Philippiens depuis sa prison romaine, supplie
littéralement l'église : « Rendez ma joie parfaite ! » Ce n'est pas une
suggestion pastorale parmi d'autres ; c'est le cri d'agonie d'un père spirituel
qui voit ses enfants se déchirer. Et comment peuvent-ils rendre sa joie
parfaite ? En ayant « un même sentiment, un même amour, une même âme, une même
pensée ». Quatre dimensions d'une unité qui devrait être le signe distinctif
visible de l'Église de Jésus-Christ. Aujourd'hui, bien-aimés, nous ne discutons
pas d'un idéal théorique, mais de la survie même de notre témoignage chrétien
dans un monde qui nous observe avec cynisme.
Avant d'explorer cette première
dimension cruciale de notre unité ecclésiale, comprenons d'abord que l'harmonie
émotionnelle constitue le fondement même de toute communion fraternelle
authentique. Oui :
Un même sentiment : L'harmonie des cœurs.
Bien-aimés en Jésus-Christ, quand Paul
parle d'avoir « un même sentiment », il utilise le mot grec phroneo, qui
signifie littéralement « penser la même chose », mais dans un sens profondément
émotionnel et relationnel. Il ne s'agit pas d'une uniformité robotique, mais
d'une harmonie intentionnelle. Dans la première épître aux Corinthiens, le
chapitre un : le verset dix, l'apôtre supplie avec une intensité bouleversante
: « Je vous exhorte, frères, par le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, à tenir
tous un même langage, et à ne point avoir de divisions parmi vous, mais à être
parfaitement unis dans un même esprit et dans un même sentiment. »
Remarquez la progression : un même
langage, aucune division, un même esprit, un même sentiment. Cette unité de
sentiment ne peut exister que lorsque nous choisissons délibérément de
ressentir ce que nos frères et sœurs ressentent. En Romains douze : le verset
quinze, Paul ordonne : « Réjouissez-vous avec ceux qui se réjouissent ; pleurez
avec ceux qui pleurent. » Quelle prescription révolutionnaire ! Dans l'église
du pasteur, cette harmonie des cœurs avait été brisée. Pendant qu'un groupe
célébrait une victoire, l'autre complotait sa défaite. Pendant que certains
pleuraient une perte, d'autres s'en réjouissaient secrètement. Comme
l'affirmait Antoine de Saint-Exupéry : « Aimer, ce n'est pas se regarder l'un
l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction », et l'Église ne peut
survivre que lorsque tous ses membres regardent vers Christ avec le même cœur
ému.
Après avoir saisi l'importance vitale
de cette harmonie émotionnelle, élevons maintenant notre compréhension vers
cette expression suprême de l'agapè qui unit indissolublement le corps de
Christ. Oui :
Un même amour et une même âme : L'unité dans la
diversité.
Frères et sœurs en Jésus-Christ, Paul
poursuit en évoquant « un même amour » et « une même âme ». Ces deux dimensions
sont intimement liées car l'amour authentique crée nécessairement l'unité de
l'être tout entier. En Jean treize : les versets trente-quatre et trente-cinq,
Jésus prononce ces paroles monumentales : « Je vous donne un commandement
nouveau : Aimez-vous les uns les autres ; comme Je vous ai aimés, vous aussi,
aimez-vous les uns les autres. A ceci tous connaîtront que vous êtes Mes
disciples, si vous avez de l'amour les uns pour les autres. » L'amour n'est pas
simplement un sentiment chaleureux mais un commandement divin qui devient le
critère de notre authenticité chrétienne. Quand Paul parle d’« une même âme »,
il utilise le mot grec sumpsuchos, qui signifie littéralement « co-âmes » ou «
âmes fusionnées ». En Actes quatre : le verset trente-deux, nous découvrons
cette description extraordinaire de l'église primitive : « La multitude de ceux
qui avaient cru n'était qu'un cœur et qu'une âme. Nul ne disait que ses biens
lui appartenaient en propre, mais tout était commun entre eux. » Quelle image
puissante ! Des milliers de personnes, venues de milieux différents, de
cultures diverses, d'opinions variées, mais formant une seule âme. Dans la
première épître de Pierre, le chapitre trois : le verset huit, l'apôtre exhorte
: « Enfin, soyez tous animés des mêmes pensées et des mêmes sentiments, pleins
d'amour fraternel, de compassion, d'humilité. » Comme le disait si justement
Helen Keller : « Seul, nous pouvons faire si peu ; ensemble, nous pouvons faire
tellement », mais dans l'Église, ce n'est pas simplement une question
d'efficacité, c'est une question de témoignage divin.
Ayant observé ces deux piliers
essentiels de notre unité, tournons maintenant notre attention vers cette
dimension intellectuelle et spirituelle qui couronne et perfectionne notre
communion fraternelle. Oui :
Une même pensée : La maturité spirituelle collective.
Bien-aimés du Seigneur, Paul conclut
son exhortation en mentionnant « une même pensée ». Cette expression ne
signifie pas l'absence de diversité théologique ou l'interdiction de questions
intellectuelles, mais plutôt une orientation commune vers la vérité de Christ.
Dans l'épître aux Éphésiens, le chapitre quatre : les versets onze à treize,
l'apôtre explique le processus de cette maturation collective : « Et Il a donné
les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme
évangélistes, les autres comme pasteurs et docteurs, pour le perfectionnement
des saints en vue de l'œuvre du ministère et de l'édification du corps de
Christ, jusqu'à ce que nous soyons tous parvenus à l'unité de la foi et de la
connaissance du Fils de Dieu, à l'état d'homme fait, à la mesure de la stature
parfaite de Christ. » Voyez-vous la progression divine ? Les dons divers mènent
à l'unité de la foi et de la connaissance. En Philippiens trois : le verset
quinze, Paul affirme : « Nous tous donc qui sommes parfaits, ayons cette même
pensée ; et si vous êtes en quelque point d'un autre avis, Dieu vous éclairera
aussi là-dessus. » Quelle sagesse pastorale ! Il reconnaît la possibilité de
désaccords tout en maintenant l'impératif de l'unité. Dans la première épître
aux Corinthiens, le chapitre deux : le verset seize, l'apôtre pose cette
question provocante : « Car qui a connu la pensée du Seigneur, pour L'instruire
? Or nous, nous avons la pensée de Christ. » Avoir « une même pensée », c'est
partager collectivement la pensée de Christ. Comme l'affirmait Albert Einstein
: « L'esprit qui a créé un problème ne peut être le même que celui qui le
résout », et dans l'Église, c'est la pensée de Christ qui résout tous nos
conflits.
Souvenez-vous du pasteur. Six mois
après son décès tragique, son fils, également pasteur, est revenu dans cette
église dévastée. Il a rassemblé les cinquante membres restants et a partagé le
journal intime de son père. Page après page révélait l'agonie d'un berger
voyant son troupeau se déchirer. Les larmes ont coulé. Les cœurs se sont
brisés. Les ennemis se sont embrassés. Ils ont décidé de tout recommencer,
fondant leur communion sur ces quatre piliers : un même sentiment, un même
amour, une même âme, une même pensée. Aujourd'hui, cinq ans plus tard, cette
église compte mille deux cents membres et est devenue un modèle d'unité dans
toute la région.
Frères et sœurs bien-aimés, alors que
nous arrivons au terme de cette exhortation solennelle, permettez-moi de vous
ramener au cœur brûlant du message de Paul. « Rendez ma joie parfaite » – ces
mots ne sont pas une demande égoïste d'un apôtre capricieux, mais le cri d'un
père spirituel qui comprend que sans unité, l'Église n'est qu'une coquille
vide, un mensonge vivant, une contre-témoignage au monde. Un même sentiment
signifie que nous choisissons intentionnellement l'harmonie émotionnelle plutôt
que la division. Un même amour signifie que nous aimons comme Christ a aimé,
inconditionnellement, sacrificiellement, éternellement. Une même âme signifie
que nous fusionnons nos êtres dans une communion si profonde que les blessures
de l'un deviennent les blessures de tous. Une même pensée signifie que nous
orientons collectivement nos intelligences vers la révélation de Christ plutôt
que vers nos opinions personnelles.
Bien-aimés dans la foi, combien
d'églises doivent encore mourir avant que nous prenions cette exhortation au
sérieux ? Combien de pasteurs doivent encore s'effondrer sous le poids de nos
divisions ? Combien de témoignages chrétiens doivent encore être détruits par
notre incapacité à vivre ces quatre dimensions de l'unité ? Le monde nous
observe. Il ne sera jamais convaincu par nos doctrines, aussi précises
soient-elles, ni par nos programmes, aussi impressionnants soient-ils, ni par
nos bâtiments, aussi magnifiques soient-ils. Il ne sera convaincu que lorsqu'il
verra l'impossible : des personnes différentes vivant dans une unité
surnaturelle qui ne peut venir que de Dieu.
Rendons parfaite la joie de Christ.
Qu'il en soit ainsi. Amen et Amen.